Dans un monde du football encore largement dominé par les hommes, quelques femmes audacieuses osent briser les barrières et se faire une place dans un métier sélectif : celui d’agent de joueurs. Une profession où il faut de l’instinct, du flair et un carnet d’adresses bien garni pour repérer les talents et négocier les meilleurs contrats. En Afrique centrale, Amand Mireille MBALLA et Carine Nina TELLA tracent leur route avec détermination, ouvrant la voie à une nouvelle génération de femmes passionnées de ballon rond.

Un parcours forgé par la passion et la résilience
Le football, Amand Mireille Mballa l’a d’abord vécu sur le terrain. Ancienne joueuse, sept fois vainqueure de la Coupe du Cameroun, elle a connu l’adrénaline des matchs avant de devenir agente FIFA. Mais au-delà de sa carrière, c’est sa volonté d’aider les jeunes talents qui l’a poussée à franchir le pas. « Je souhaitais utiliser mon expérience pour aider d’autres jeunes talents à naviguer dans ce domaine complexe. Selon moi, chaque joueur mérite d’avoir un représentant qui comprend ses aspirations, ses défis, et qui peut l’aider à réaliser son potentiel sur le plan international », explique-t-elle. Vice-présidente de l’Association Camerounaise des Agents de Football (ACAF), elle œuvre aujourd’hui pour professionnaliser le métier d’agent au Cameroun et faciliter l’accès des jeunes talents africains aux grands clubs internationaux.
Carine Nina Tella, elle, a grandi au rythme du football. Enfant, elle habitait en face d’un lycée doté d’un complexe sportif où les matchs s’enchaînaient sous ses yeux. Mais ce qui l’a poussée à devenir agente, ce sont les nombreuses injusticesqu’elle a observées : « J’ai vu des coachs demander de l’argent aux joueurs avant de leur offrir une opportunité. J’entendais les plaintes sur les agents véreux. Je me suis dit : il faut changer cela. » Encouragée par son entourage et armée d’une volonté de fer, elle s’est lancée avec un objectif clair : défendre les intérêts des joueurs avec intégrité. Son approche met un point d’honneur sur la discipline et l’éducation : « Pour moi, faire des études est une priorité absolue. Le football est un domaine où il y a beaucoup d’appelés, mais très peu d’élus. Il faut toujours avoir une alternative. »

Un métier d’homme où les femmes doivent se battre
Si ces femmes ont su se frayer un chemin, le métier d’agent de joueurs reste un véritable parcours du combattant pour elles. Ce domaine est encore largement dominé par les hommes, et il faut une ténacité à toute épreuve pour y évoluer. En Afrique, les agents doivent non seulement faire face aux difficultés structurelles du football, mais les femmes, elles, doivent aussi affronter des préjugés tenaces qui remettent en question leur légitimité. Carine Nina Carine, bien qu’au début de sa carrière, est pleinement consciente des défis à venir : « Je n’ai pas peur. J’ai des principes, des valeurs et je suis bien accompagnée. Mon travail et mes connaissances seront mes meilleurs atouts. »
Mais les choses évoluent progressivement nous rassurent-elles. De plus en plus d’hommes du milieu commencent à les soutenir et à comprendre que leur présence enrichit le football en apportant une nouvelle sensibilité dans l’accompagnement des joueurs où chacune se plaît à rajouter son œuvre à l’édifice, à l’instar d’Amand Mireille Mballa « […] Je m’efforce de créer un réseau solide avec des clubs, des sponsors, et des écoles de football. Je suis également active dans la sensibilisation des jeunes joueurs et de leurs familles sur l’importance de la planification de carrière et de l’éducation, afin qu’ils puissent prendre des décisions éclairées concernant leur avenir. »
Un avenir prometteur pour les femmes dans le football
Avec le développement du football féminin, les opportunités s’élargissent pour les joueuses et les agentes. En 2022, la Confédération Africaine de Football (CAF) a augmenté le budget d’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations féminine à 2,4 millions de dollars. Cependant, des chiffres d’ONU Femmes estiment à moins de 20% le nombre de femmes dans les sports collectifs en Afrique. Selon Carine Nina « De plus en plus les clubs et de ligues adoptent des structures professionnelles, offrant des contrats aux joueuses et des conditions de travail améliorées notamment les congés de maternité qui sont rémunérés aux 2/3 de leur salaire etc. ». Pour Amand Mireille Mballa, la clé est de créer un réseau fort entre agentes, joueuses et clubs, afin de structurer davantage ce secteur et garantir une meilleure représentation des femmes. À travers l’ACAF, elle œuvre pour la formation des nouveaux agents et l’insertion des femmes dans ce métier.
Un message aux jeunes femmes
Ces pionnières partagent une ambition commune : inspirer d’autres femmes à les rejoindre dans ce domaine. Amand Mireille Mballa encourage d’ailleurs les jeunes femmes camerounaises à oser : « Nous avons besoin de plus de voix féminines dans le football pour accompagner nos talents. Ne laissez pas la peur vous freiner. Le métier d’agent est une opportunité unique de promouvoir l’égalité et l’autonomisation dans le sport. Engagez-vous, formez-vous, et vous verrez que vous avez votre place ici. » Le chemin est encore long, mais grâce à des figures comme Amand Mireille Mballa et Carine Nina, les choses évoluent. Ces femmes prouvent que le football peut aussi se conjuguer au féminin, et que l’avenir des agentes de joueurs en Afrique centrale est entre de bonnes mains.