L’Art-thérapie, une médecine ancienne au goût du jour 

Saly Diaby

Il y a des pratiques, des sonorités, des images et des odeurs, qui stimulent nos sens au quotidien et que nous portons dans un sac à dos avec lequel on grandit. Cela nous construit avec de bons ou de mauvais souvenirs et un battement de cils, tout se transforme dans ce que l’on réduit à une banale vie d’adulte. Plus ou moins  palpitante, répétitive et remplie de frustrations, car on est devenus “ responsables”. Sommes-nous devenus malgré tout, assez éduqués à nous rapprocher de ce qui nous fait réellement du bien? Les aptitudes naturelles créatives et artistiques  de l’humain ont pourtant fait  leurs preuves, mais tout semble encore à découvrir et à mettre en œuvre dans notre modernité.

Les femmes ont depuis la nuit des temps du Nil été les garantes de remèdes, accompagnées de prêtresses et de savants s’étant initiés non seulement aux disciplines des Arts mais à leur impact  physique, scientifique et émotionnel sur l’homme et son environnement. 

Il n’était plus alors pas question de dissocier l’influence de la création, de celle de  la vibration d’une œuvre matérialisée et de son expansion riche en énergie. Cet ensemble d’éléments à la fois conscients et inconscients sont devenus en d’autres termes la combinaison de réactions neuronales et le soin des couches de l’âme. 

Un effluve d’études, d’expériences et de théories a traversé le temps. De la Grèce Antique, aux affirmations des Dr Keil et Freud, l’art s’impose dans le kit du “bon thérapeute” et la compréhension de l’humain et son humanité; malgré les difficultés évidentes face aux nouvelles règles de l’industrie pharmaceutique et de la gouvernance mondiale pour la Santé. 

Aujourd’hui l’art-thérapie se définit par l’utilisation de plusieurs branches artistiques  en ayant  comme intention  première de libérer et guérir la psyché. On la découvre la plupart du temps  à travers la peinture, l’écriture, le théâtre, la sculpture ou la poterie,  la musique, la danse, la couture, le tricot et plus encore. 

Alors, ne cédons pas  à la crainte de la performance et aux préjugés!

L’art-thérapie ne s’adresse pas exclusivement  aux “ virtuosi”, il s’agit au contraire, de laisser parler ce qu’il y a de plus instinctif et de révéler votre simple nature. Votre thérapeute vous accompagne à l’éveil de votre maître intérieur, en ayant plus de contrôle de votre espace, sans vous limiter. Vous souvenez-vous de ce sac à dos avec lequel vous avez grandi? Il  contenait déjà toutes les formules magiques  car l’ART, vous a enveloppés durant l’enfance. On y retrouvait des couleurs, des pinceaux, des feuilles, des carnets avec un  cadenas  en cœur et une clé souvent défectueuse, mais on se sentait en sécurité une fois entendu le petit click, hélas. Peut-être  aviez-vous un baladeur et votre musique préférée, et un change pour aller à la danse avec vos chaussons…

L’art thérapie interpelle votre enfant  intérieur, entraînant une gymnastique  entre les sentiments de perte, les traumatismes, les blocages accumulés dans le temps et  les nouvelles connexions neuronales que nous pouvons nous-mêmes créer et réparer.  Le jeu et la simplicité du moment rééduquent notre esprit. Nous pouvons suivre les notables travaux de la psychologue clinicienne, art-thérapeute malgache Natacha Ranaivoarindrina, qui nous explique  dans sa synthèse d’accompagnement dans le milieu carcéral: “ le jeu du partage d’énergie”. Il permet  de “découvrir et de coopérer autours des  émotions “, ceci par une approche  théâtrale laissant place à une écoute de soi plus attentive. Une fois manifestées, l’analyse et la meilleure gestion de soi entrent en considération. Les nouvelles “compétences cognitives, émotionnelles et sociales nous aident à “cultiver différentes fleurs”, qui germent en nous. 

Au Sénégal, la clinique Moussa Diop du Centre Hospitalier National Universitaire de Fann, a un atelier d’expression artistique depuis 1999, sont encore précurseurs de cette approche sur le continent africain. Bénéficient de plusieurs résultats encourageant  auprès de leurs patients  qui parfois parviennent  à dépasser le statut clinique en devenant de véritables artistes exposant leurs œuvres. En parallèle, un institut de soin en art-thérapie a ouvert à Porto-Novo au Bénin, pour venir en aide aux personnes en situation de handicap, porté par l’ONG Vie et Solidarité, fondée par Louis Oke Agbo en 2017

La peinture, qui brille de complexité et de noblesse, s’inscrit à la fois  dans une intime relation entre la matière, le mouvement, l’image et la couleur. 

Saly Diaby
Saly Diaby

C’est ainsi que l’artiste  Saly Diaby dite Saly D. née à Bagneux, aux origines de la Teranga,  se spécialise dans le domaine en passant par la danse, le chant, le théâtre pour enfin trouver sa voie sur le champ des toiles. Connue désormais pour ses créations et son engagement afrocentré,  ses ateliers ont révélé la nécessité d’exploiter l‘art comme  instrument fédérateur des peuples. “L’art-thérapie peut devenir un outil de mémoire, de transmission et  de reconstruction collective”. Ses ateliers s’adressent à un jeune public, qu’elle considère comme les “maîtres de l’art-thérapie” par leur spontanéité innocente, mais aussi aux adultes et aux familles. C’est alors une éclosion  qui s’élève vers une “clarté intérieure et la réconciliation des liens familiaux. Une guérison discrète mais profonde”. Elle en dépose une pratique nommée  “Kendeya” signifiant “guérison” en langue diakanké: permettant d’extérioriser ce l’on n’ose pas dire de son vécu, comme “l’exil, la violence, les silences hérités ou toute autre injustice. “  

Marie-Hélène Bellanger
Marie-Hélène Bellanger

De nombreux sites associatifs ont émergé ces dix dernières années, surtout après la pandémie du Covid 19. Les femmes afro descendantes ont doublé d’effort, telles des gardiennes de médecines parallèles  et cette urgence de reconnexion par l’art se fait ressentir aux  quatre coins du monde.  À l’exemple de Marie-Hélène Bellanger, fondatrice  du centre “Art-Thérapie Martinique”, qui s’appuie avec fiabilité sur la création et les neurosciences. 

Toni Blackman
Toni Blackman

Les formes, les styles et les mélodies de la thérapie  se mêlent à la caisse claire qui résonne par la culture hip-hop, cette fois aux USA, dans la vision de Toni Blackman, à l’origine du mouvement Hip-Hop is Therapy: elle n’hésite pas à utiliser la voix et le flow pour que chacun puisse s’affirme à travers le mouvement. 

Cette médecine qui se présente à chacun pour asseoir son identité, son histoire, ses origines, ses souvenirs, devient un acte de foi de résistance à la fois personnelle  et universelle.

La censure de soi, n’y a pas sa place, dépassant toute frontière, dogme ou croyance. 

N’est-ce pas une belle  invitation  à s’offrir une danse avec la vie? À ressentir le rythme, votre rythme qui “ ordonne tout ce concert vers la lumière de l’Esprit”. Léopold Sédar Senghor, “L’art africain comme philosophie” – Essai de Souleymane Bachir Diagne. 

Image de Kaïgé-Jean Bale Simoës de Fonseca

Kaïgé-Jean Bale Simoës de Fonseca

Correspondante officielle ELLE Côte d'Ivoire. Femme de culture et de médias. Engagée pour le développement social, artistique et educatif. Aussi Membre UNESCO ICAEP NGO, TDAIO et Porte Parole la JMCA. CEO LUNABLU|Press&Comm

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